Amérique oblige, si à 34 ans, Clément Goehrs vient d’emménager à New-York, ce n’est pas par réminiscence d’un rêve américain idéalisé pendant ses études de médecine, mais uniquement en raison de la vision qu’il a de l’avenir de Synapse Medicine. New-York est en somme une nécessité industrielle qui répond entre autres au déclassement de l’Europe en matière de recherches pharmaceutiques. Il fut mis en évidence au plus fort de la crise de la Covid par l’incapacité de l’Europe à mettre au point un vaccin efficace. Fascinante réactivité de l’Amérique que Clément Goehrs avait déjà pu mesurer auparavant puisque dès la fin de son internat, il prenait le chemin de la Californie et de Stanford afin d’y parachever un Master en bio- informatique et une formation d’épidémiologiste.
L’Amérique où les effets indésirables des médicaments font des ravages. Ils y seraient responsables chaque année de quelque 350 000 hospitalisations et représenteraient le coût exorbitant de 500 milliards de dollars. Précisément l’ambition, plutôt la vocation d’ailleurs de Synapse Medicine, la start-up bordelaise que crée Clément Goehrs en 2017 accompagné par ses trois associés Louis Létinier, Bruno Thiao-Layel et Alicia Bel-Létoile, est de prévenir tous ces effets indésirables en misant sur l’Intelligence Artificielle. Sa plateforme SaaS à destination de tous les acteurs de santé leur donne une vision complète et actualisée des risques médicamenteux. L’innovation est d’autant plus capitale qu’elle peut être individualisée selon le profil clinique des patients. L’Amérique représente donc pour la start-up bordelaise et l’équipe que Clément Goehrs prévoie de recruter sur place, un champ infini d’expérimentations et un marché potentiel sans limites. Constatons que Synapse Medicine a aujourd’hui les moyens financiers indispensables à la réalisation d’une telle ambition. En effet ses investisseurs, dont XAnge, actionnaire historique de la start-up bordelaise, viennent de lui apporter 25 millions d’euros. Une présence à Berlin et à Londres compléteront cette offensive américaine.
Il ne faudrait surtout pas croire que Clément Goehrs part à l’assaut de l’Amérique sabre au clair. Ce serait mal le connaître. Grâce à son esprit scientifique hérité d’une famille de médecins, chez lui, tout est soigneusement étudié, analysé avant la prise de décision et formalisé dans le bon timing.
Le développement et la réussite de son entreprise absorbent toute l’énergie de Clément Goehrs. Pourtant il a toujours réussi à séparer vie professionnelle et vie privée, refusant par exemple de travailler le soir et les week-ends où il arrive qu’on l’aperçoive sur une planche de surf dans le bassin d’Arcachon, auquel il est très attaché. « Exercice d’équilibre qui est une parfaite allégorie de la vie de l’entreprise », explique-t-il, « les vagues sont telles qu’elles sont, on ne peut rien y faire, sauf faire de son mieux pour les surfer».
A sa façon, Synapse Medicine incarne à la perfection le modèle de la start-up avec son goût de la conquête et du défi mais dans une ambiance vivante, décontractée où il ne manque ni confiance ni liberté ni surtout bienveillance parmi une équipe qui comptera bientôt 150 personnes. La réussite économique compte évidemment pour le jeune entrepreneur bordelais qui a créé sa société dès la fin de son internat. Mais derrière cette volonté de réussite, apparaît très vite en filigrane une autre motivation tout aussi importante, un combat de chaque instant pour améliorer la vie des patients. Cette dimension humaniste n’est en rien une posture. Au contraire, on en ressent la vérité profonde à l’écouter.